Pour lutter à armes égales, les filières mondialisées pallient l’absence de régulation internationale par le déploiement de normes partagées. La France a longtemps été un acteur essentiel de ces négociations entre acteurs privés, avec le soutien de l’administration publique. Pourtant, ces dernières années, nous avons laissé le champ libre aux géants du commerce mondiale, dont l’agenda diffère grandement du notre !
Eva Sas rappelait au gouvernement l’importance de soutenir les acteurs engagés dans ces négociations afin d’établir une stratégie publique au service de notre souveraineté. Publiée le 3 juin au journal officiel, en voici le texte en intégralité :
Entreprises
La stratégie normative de la France pour sa souveraineté et sa compétitivité (7198)
Mme Eva Sas attire l’attention de M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur la stratégie normative de la France pour sa souveraineté, complémentaire de son pouvoir réglementaire. Dans un contexte de recomposition des équilibres industriels mondiaux, la France fait face à une double urgence : réindustrialiser durablement sur ses territoires, mais aussi préserver sa capacité à s’inscrire dans un environnement géoéconomique tendu.
Par exemple, la Chine entreprend une politique commerciale toujours plus agressive et réaffirme sa volonté d’imposer ses standards au reste du monde. En effet, pendant que la France parle relocalisation, la Chine soumet les autres puissances à son potentiel économique : son plan « Made in China 2025 » a déjà atteint 86 % de ses objectifs, positionnant le pays en leader mondial de divers secteurs. De plus, avec « China Standards 2035 ». Pékin entend désormais prescrire ses normes à l’échelle mondiale, en matière industrielle notamment. Ce contexte prend un relief particulier alors que M. le ministre a rencontré M. He Lifeng, l’un des quatre vice-Premiers ministres de Chine.
Cette recomposition s’inscrit en réalité dans un combat normatif. Ce sont aujourd’hui les normes internationales, définies collectivement au sein notamment de lSO (organisation internationale de normalisation) ou de l’IEC (commission internationale électrotechnique), qui structurent les marchés et déterminent les conditions de la compétition économique mondiale. Pourtant, Mme la députée s’inquiète que la nature même de ces standards soit souvent mal comprise par les acteurs nationaux. Contrairement à la réglementation, les normes résultent d’un consensus entre acteurs économiques, experts et institutions. Elles ne sont pas juridiquement contraignantes, mais elles s’imposent dans les faits, en fixant des standards et un cap que les entreprises doivent suivre pour accéder aux marchés et garantir l’interopérabilité entre leurs solutions. Les normes volontaires constituent un véritable levier d’influence au niveau mondial. Elles permettent de structurer des secteurs clés pour l’avenir technologique, économique et sécuritaire,
tels que la transition énergétique, pilier de l’ambition climatique française.
Pourtant reconnue à ses débuts comme une véritable puissance normative, la France perd aujourd’hui en influence. Pour la première fois, elle glisse au 4e rang mondial au sein des organismes internationaux de normalisation, derrière la Chine, les États Unis et l’Allemagne. Elle lui demande donc comment il entend relancer pleinement la dynamique de normalisation et soutenir activement la participation des entreprises françaises aux instances normatives internationales. En effet, ne pas encourager ces entreprises à le faire reviendrait à abdiquer une part de la souveraineté française.